Aux Restos, « le ciné, c’est pas que du ciné »

27 juin 2024

Quand l’argent manque, les loisirs passent souvent à la trappe. On le sait peu mais chaque année, les Restos emmènent près de 70 000 personnes dans les salles obscures. Parce qu’aller au cinéma, c’est aller voir un film… et bien plus encore.

Une petite quinzaine de silhouettes se pressent devant les portes d’un cinéma parisien. En ce samedi pluvieux, les mines sont réjouies. Dans la file, on discute du dernier film vu, on débat des affiches.  

Familles, personnes seules, enfants… chaque année, les Restos du Cœur envoient près de 70 000 personnes accueillies au cinéma. Car pour bon nombre de foyers accompagnés par l’association, une sortie au cinéma n’est pas seulement une sortie au cinéma. Les enjeux d’une telle sortie outrepassent de loin le simple visionnage d’un film.

Sortir, « comme tout le monde »

« Le cinéma est une activité qui permet d’être comme les autres, d’avoir accès à la même culture que tout un chacun », sourit Xavier, 70 printemps, bénévole culture aux Restos depuis sept ans. Dans un contexte d’inflation et d’accroissement des inégalités, « le cinéma est une ouverture sur le monde pour des gens qui ne voyagent pas forcément ou qui n’ont pas accès à d’autres cultures. »  A l’entrée de la salle, Isabella, 53 ans, abonde :  

Je viens dès que je peux car j’adore les comédies

Les maigres revenus de cette intermittente du spectacle ne lui permettent pas de se passer de l’aide des Restos. Continuer à voir des films est pour elle un loisir essentiel qui met à distance, le temps d’une séance, les soucis quotidiens.

Rompre sa solitude

Idem pour Gisèle, petite mamie du quartier : « Une fois, j’ai vu un dessin animé. Ça ne m’a pas plu mais ce n’est pas grave, il y en a pour tous les goûts. J’habite seule dans un petit appartement. Avec la Covid, on ne pouvait plus aller au cinéma et cela me rendait triste. »  Les séances favorisent les liens entre les personnes accueillies mais aussi entre les personnes accueillies et les bénévoles. Elles constituent aussi « une porte d’entrée attractive sur d’autres activités d’aide à la personne », résume Xavier, bénévole.   

Je crois beaucoup à la force émotionnelle comme facteur de changement. Dans son approche de la culture, la spécificité des Restos est aussi de proposer des activités vectrices d’émotion pour nourrir des parcours d’intégration et d’émancipation.

Maintenir un accès à la culture

Au menu de ce samedi, Second tour, long métrage d’Albert Dupontel. Invité surprise, le comédien Nicolas Marié est venu parler du film à l’issue de la projection. Entre septembre à juin, les deux séances parisiennes du samedi sont régulièrement suivies d’une rencontre. Patrice, la petite quarantaine, apprécie :

« C’est ce que je préfère : les débats à la fin. On peut côtoyer les gens. Les films sont récents. »   En charge d’animer les séances, Thierry, intermittent du spectacle et grand cinéphile est aussi heureux que les spectateurs : « Cela fait 27 ans que je fais cela et c’est pour moi un vrai bonheur », rayonnne-t-il, avant d’ajouter :  « Les Restos du Cœur nous apportent un public important. Il arrive que la séance soit complète, en particulier avec les blockbusters américains comme The Marvels ou les Gardiens de la Galaxie. Ce sera sans doute aussi le cas avec la prochaine projection de Pat’Patrouille.  » 

C’est l’occasion de montrer à des enfants des films qu’ils n’auraient pas pu voir autrement. Et comme leurs copains, ils pourront en discuter à la récré.

A la sortie, les discussions se poursuivent sur le trottoir. “ Il y a un côté vivant avec l’animation de ces séances ”, renchérit une quinquagénaire. “ Avec Les Restos, on peut aussi aller au théâtre ou au musée  “. Xavier, bénévole, confirme : « Le cinéma fait partie intégrante d’un projet culturel plus vaste qui inclut tout ce qui est spectacle mais aussi pratiques artistiques”.  

Un petit plaisir quand ils se font rares

Julien, étudiant de 27 ans, jubile : « Je suis à la fois accueilli et bénévole au centre des étudiants de la rue du Louvre. Grâce aux invitations distribuées dans ce centre, j’ai pu assister depuis trois ans à de nombreuses projections. » Alain, la cinquantaine, reboutonne son pardessus et s’éloigne à pas lent : « J’aime bien le cinéma le samedi matin. Cela me motive à me lever. » 

Un programme magnifique… et de précieux partenaires

La programmation propose des films à l’affiche dans de grandes salles CGR, Pathé-Gaumont, Kinepolis ou Megarama, ainsi que dans des salles indépendantes. Depuis 2019, The Walt Disney Company France offre des milliers de places aux familles des Restos. En 2024, CGR et Disney ont permis de garantir 40 000 entrées pour découvrir cinq films : « Nous avions fait une première action avec les Restos du Coeur et nous nous sommes vite rendu compte qu’au-delà de l’aide alimentaire, le besoin en matière de loisirs était très fort, se souvient Nathalie Dray, directrice de la Communication et RSE de Disney France. En prime, pop-corns et boissons sont offerts à l’entrée. « Nous avons réfléchi au moyen de faire vivre une expérience aux familles. »

A la marge de ses autres contributions, BNP Paribas, partenaire majeur des Restos, offre également 10 000 places pour célébrer la Fête du cinéma, partout en France, du 30 juin au 03 juillet.